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Channel: Littérature pour enfants, littérature pour adultes
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Bref, je suis auteur jeunesse

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Dans la vie, au début on naît, à la fin on meurt, entre les deux il y en a qui décident d'écrire des livres pour les enfants.

Ce matin je me réveille, j'ai une super idée d'histoire, y aurait un chaton qui s'appellerait Bouboule comme mon chaton à moi, je commence à écrire, ça se passe bien à part que Bouboule me griffe l'épaule pendant que j'écris.

Arrête Bouboule je travaille


Il y a un bon feeling, j'ai le bon rythme, je commence à me demander ce que je vais faire de mes millions quand je serai publié, faudra que je m'habitue à ma vie de riche.

Je serai à la fois extrêmement riche et extrêmement généreux.

Ca y est! j'ai fini l'histoire. Ca a mis longtemps quand même, au moins vingt minutes. Je mets le titre: Bouboule le chaton cool qui tourneboule. Je sais que c'est un titre qui va plaire aux enfants parce qu'ils aiment le son 'oule'.

"Mais pourquoi vous croyez qu'on aime le son 'oule' bordel!"

Hop je l'envoie aux trois éditeurs jeunesse de France, L'Ecole des Loisirs, le Père Castor et Gallimard. Ah il y a aussi la Bibliothèque Rose mais je trouve pas son adresse. Je suis sûr qu'ils vont adorer! C'est bien leur truc!


"Regarde encore ce manuscrit pourri qu'on a reçu!"

J'attends trois jours, je les appelle, ils disent d'attendre encore, c'est exagéré, et là deux mois après je reçois une lettre.

"...n'entre pas dans le cadre de nos collections."

Je vais sur des sites d'auteurs jeunesse pour me plaindre, et là, c'est trop bizarre: il y a des auteurs pas connus et pas riches! Ils me disent de lire des livres pour enfants pour apprendre à quoi ça ressemble, et aussi d'aller voir à quoi ressemble un enfant aussi si j'ai le temps.

"Amazing!"

En fait c'est plus difficile que ce que je croyais, je bosse un peu le sujet, je me relance, cette fois j'enlève les doudous, les lapinous et les bisous, je prends plus de temps à l'écrire, je le fais relire et j'expédie Bouboule: Chaton Cow-Boyà d'autres éditeurs, et là après une autre attente, la lettre arrive, on veut bien me publier!

Champion du monde!!!!

 J'appelle l'éditeur et je lui dis:

"Aboule l'avance de 100 000 euros"

Il me dit:

"Divise ça par 100 000 et enlève 1"
Je lui dis:

"Ca me laisse pas beaucoup pour devenir riche"

Il me dit:

"Tu seras riche de rendre les enfants si heureux"

Je me dis:

"Arnaque ou bien...?"

Il me dit:



Je dis deal. L'éditeur m'envoie un contrat, c'est hyper long, je comprends rien, mais ça a l'air légal, le texte est justifié à droite. Alors c'est parti:
"Signé!"
J'ai pas fait gaffe de voir si c'était écrit si j'avais du pognon si jamais le livre se vend en ebook ou en film ou en dessin animé ou en traduction. Sur le moment, je me dis:

"J'ai d'autres choses à faire"
Mais deux mois plus tard la Corée est intéressée, on me propose 50 euros, c'était dans le contrat, je suis là:

Merde
J'ai vraiment l'impression de l'avoir dans le
 
Pas le temps d'y penser, on m'appelle, je suis nominé pour un prix!

"Champion du monde!" (bis)

La dame est charmante mais il y a un mais: 
"Vous êtes seulement nominé si vous êtes disponible pour venir le jour de la date de remise des prix."
Chelou mais j'accepte, même si ça me fait devoir prendre un jour de congé, c'est la gloire quand même. Le jour du prix, je me réveille tôt, je  -

 
 
 
 J'y suis presque!


J'arrive, on me dit:
"Les enfants vous attendent avec impatience!"
Je le savais! Je me sens


On me présente aux enfants:

"Voici l'auteur, qui va mener l'atelier pâte à sel de cet après-midi!"
 C'était pas prévu, je suis un peu dérouté, tant pis, je veux pas décevoir, 


J'ai l'impression quand même que je déçois un peu,
 
 Mais c'est pas grave, les enfants sont super heureux, je suis comblé,
 

On n'a pas parlé de mes livres, pas eu le temps, tant pis! de toute façon c'est pas moi qui ai gagné le prix, c'est John Green, je sais pas qui c'est, il est pas venu le chercher, je repars,  

 
 
 

Le deuxième TER est en grève, moi et l'autre auteur qui s'est déplacé, on fait le reste à pied,

il est plus beau gosse que moi
Y a plus de vols Ryan Air à cette heure-là, on finit la soirée ensemble, je m'aperçois que l'école lui a payé son déplacement + une journée au tarif Charte, je suis là:
"Ah bon normalement on doit être payé pour faire des interventions scolaires?"
Il me console:
"Rejoins la Charte, ça ira mieux"     



Le lendemain matin, je prends mon avion, mon métro, mon Vélib, je retrouve mon lit, je vais sur Internet, je m'inscris à la Charte, je commence à essayer de comprendre les contrats, je lis les guides de la Charte, je m'aperçois que j'aurais pas dû toucher 1,5% sans à-valoir sur la vente de mon manuscrit,


Je suis tout beau tout neuf tout fort, prêt à l'attaque, le prochain manuscrit que j'envoie à mon éditeur, je saurai mieux quoi faire, et celui d'après encore mieux, et ainsi de suite,

"Pas de provisions sur retour."
Et maintenant j'ai plein d'amis auteurs avec qui je peux parler, des grands et des petits comme moi,
ils sont fatigués à la fin des salons,

Ca commence à aller mieux.

Bref. Je suis auteur jeunesse.





Des pages qui se tournent

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Oui ça fait très longtemps que je n'ai pas écrit sur ce blog! je reviens bientôt, promis, avec même une petite série de trucs que je suis en train de préparer. En attendant, quelques nouvelles en vrac.

La grosse nouvelle de début septembre, c'était la signature du contrat de vente des droits cinématographiques des Petites reines. J'ai été sidérée de voir depuis la sortie du livre que certaines maisons de production étaient intéressées. On s'est mis d'accord - Phi-Anh NGuyen, qui est l'agent ciné extraordinaire de Sarba, a mené les opérations - avec un couple producteur-réalisateur dont on avait adoré les premières productions. C'est donc Lionceau Films qui a acheté les droits, et Benjamin Guillard est en charge de l'adaptation. Benjamin et moi avons un imaginaire et un humour étrangement similaires, donc à mon avis ça va bien se passer...

Pour fêter ça, voici quelques vélos récoltés cet été:

la petite reine couverte de 100 000 canards...

un vélo tricoté

des tas de coureurs cyclistes

eh oui, j'étais à Amsterdam.
A la rentrée je suis allée à la fête de l'Huma dédicacer en compagnie, entre autres, de Benoît Minville et de Claudine Aubrun. J'y ai rencontré le charmant Tom, du blog La voix du livre, qui est venu nous voir spécialement là-bas.



Ensuite voici des nouvelles de La pouilleuse, lui aussi sorti en allemand chez Carlsen (qui ont aussi acheté les droits allemands des Petites reines)

la couv un poil angoissante

traduction d'Annette von der Weppen

et puis aussi des nouvelles du troisième tome de mes aventuriers britons, qui vont cette fois en Américanada pour le Royal Bake-Off(le royal concours de pâtisseries!)

sont beaux tous les trois ensemble, non?

et puis aussi, tant qu'on y est, la nouvelle rigolote que le deuxième tome, The Royal Wedding-Crashers, sera traduit en français sous le nom Les royales demoiselles d'horreur. L'occasion de tirer mon chapeau (melon) à Amélie Sarn, qui traduit magistralement cette petite série.

J'ai aussi reçu une Louve en coréen!



Et puis d'autres pages qui se tournent, et d'autres horizons qui s'ouvrent: j'entre dans ma dixième année en Anglicheland, et cette dixième année me verra changer de ville. Car j'ai obtenu un poste de lecturer, sur trois ans, à l'université de York, où je commencerai en janvier 2016.

je vais pas trop être dépaysée: passage d'une ville médiévale sublime à une autre ville médiévale sublime
moi, tranquilou sur les remparts de ma nouvelle ville
J'y enseignerai des tas de choses que j'aime, à l'intersection de la philosophie et sociologie de l'éducation, et des études littéraires. C'est une grande étape pour ma carrière universitaire et je suis extrêmement heureuse d'avoir obtenu ce poste.

A bientôt pour d'autres nouvelles et d'autres billets, donc!

Refuges, d'Annelise Heurtier

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Nous interrompons nos programmes pour, une fois n'est pas coutume, une chronique (ou plutôt quelques pensées) sur le roman Refuges, d'Annelise Heurtier, sorti cette année chez Casterman.


Ca fait plusieurs années que je lis des livres d'Annelise et j'ai toujours aimé son style doux, poétique, précis, et ses thèmes vastes comme le monde: elle était passée de l'Amérique ségrégationniste dans le best-seller Sweet Sixteenà la Mongolie dans Là où naissent les nuages, et même dans ses albums et ses livres pour les plus jeunes on voit l'intérêt qu'Annelise porte au monde. Elle a toujours aimé les histoires politiquement ou socialement engagées (ce qui est, comme vous le savez sans doute, l'un de mes centres d'intérêt aussi), et le fait qu'elle vive à Tahiti depuis quelques années a sans doute aiguisé son regard sur ce qui se passe très, très loin de la métropole.

Avec Refuges on voyage à Lampedusa, en 2006, où viennent s'entrelacer les récits de plusieurs vies. Celle de Mila, jeune Romaine née en 1989 (je le dis juste parce que c'est aussi mon année de naissance tavu); et celles de Saafiya, Amanuel, Meron, Meloata, Gebriel, Pietros, adolescents érythréens que l'on suit depuis leur pays d'origine jusqu'aux côtes de la fameuse île italienne. Mila voudrait trouver à Lampedusa une légèreté, une joie de vivre qui n'existent plus dans sa famille depuis qu'un drame familial a fait sombrer sa mère dans la dépression. Quant aux ados érythréens, ils fuient tout simplement l'enfer sur terre, et rêvent de tour Eiffel et d'une vie libre.

J'ai dit que j'avais aimé les précédents livres d'Annelise, mais celui-ci est exceptionnel; non seulement dans son corpus à elle, mais plus généralement en littérature adolescente contemporaine. Ce roman, qui aurait pu être d'un consternant sentimentalisme, est absolument coruscant. A rebours des trois A de la grande majorité de la littérature ado (Action, Amour, Angoisse), il ne s'y passe presque rien. Bien sûr, les ados érythréens traversent la mer; quelques pages vers la fin sont pleines d'orages, de vagues et de terreur. Mais Annelise résiste fermement au sensationnalisme, et c'est le voyage intérieur de ces adolescents qui s'arrachent à leur pays et à leur famille que l'on suit beaucoup plus intensément. Quant à Mila, son action se résume à faire du vélo ou de la Vespa autour de l'île, et c'est au travers de ces errements circulaires que va évoluer son histoire et sa perception du monde.

L'amour... il y en a beaucoup dans ce livre, mais ce n'est pas celui, intense et capricieux, des bluettes adolescentesà la Rainbow Rowell. C'est l'amour très difficile de Mila pour une mère qui s'est enterrée vivante derrière ses lunettes de soleil; pour un père solaire et un peu désemparé; l'amour impossible pour un petit frère qui n'a pas vécu. Et puis ensuite une inclination fascinée, dont il serait faux de l'appeler sexuelle, mais très certainement sensuelle, pour la ravissante Paola qui est la Calypso de l'île et lui en fait découvrir des criques secrètes. Du côté des adolescents érythréens, il y a peu de place pour les sentiments, et pourtant la toute dernière voix sera celle, surprenante et poignante, de ce qui se fait jour quand on trouve encore un moyen de préserver son amour pour l'autre et pour l'humanité au milieu des pires angoisses.

Ce qui frappe dans ce roman, c'est quelque chose qui était déjà présent dans les précédents livres d'Annelise mais qui semble, dans celui-ci, avoir atteint son aboutissement: sa capacité exceptionnelle à l'effet de réel. L'effet de réel, c'est, comme l'analyse Barthes, cet ensemble de détails apparemment insignifiants, jetés là dans un récit par souci apparent de 'luxe' ou d'esthétique, mais qui confère une texture et une atmosphère particulière au texte l'inscrivant, pour ainsi dire, dans la droite ligne de la réalité; qui fait du récit une extension du réel.

Cet effet de réel, Annelise le développe au fil de notations discrètes, entre deux lignes de dialogue ou à travers des descriptions vives ou pensives, attirant notre attention sur, d'un côté, des objets d'une grande banalité, de l'autre, de sublimes morceaux de mer ou de falaise. Plastique, céramique, plâtre, sable, pâtisseries à la crème: on se cogne partout dans des objets divers; c'est un roman profondément psychologique et politique, mais aussi tactile et odorant.
'Ivo haussa les sourcils en signe de dénégation. Tout en se débarrassant d'un lambeau de tomate qui lui collait au poignet, il déclara:
- Franchement, c'est peine perdue. Cela nous coûterait plus cher que d'en racheter un neuf.
Mila avisa un petit bol en grès, craquelé de nervures sombres, dans lequel luisaient quelques olives à la sicilienne. Tandis qu'elle en piochait une, une idée lui traversa l'esprit:
- Peut-être que Gina Lombardi en aurait un à nous prêter?'
Ce réalisme exceptionnel, elle arrive aussi à le rendre magistralement dans ses descriptions de l'Erythrée et du voyage des adolescents. On sent une recherche faramineuse et profonde, respectueuse et passionnée, dans le soin méticuleux qu'elle prend à restituer l'atmosphère de ce pays. Mais pas seulement l'atmosphère; aussi les rêves et les espoirs de ces personnages à travers les objets qu'ils manipulent, avec (et contre) les contraintes matérielles de leur vie:
'Derrière nous se tenait Fana, le visage fendu d'un large sourire. Ses cheveux étaient tressés et perlés, relevés en une sorte de chignon dans lequel elle avait piqué un petit crayon de papier.
Du coin de l'oeil, je regardai mon père la regarder. De ses trois filles, c'était la seule qu'il considérait de cette façon. On y lisait de l'amour. De l'admiration. Fana avait eu son diplôme de fin d'études. Fana avait fait son service militaire au camp de Sawa et en était revenue. Fana travaillait pour la Patrie.
[...] Fana voulait conduire des trains. Chaque jour, à l'avant de l'une de ces locomotives à vapeur, sur l'unique ligne de chemin de fer, relier Asmara à Massawa. S'arrêter dans les petites gares, traverser les forêts d'épineux, les plaines piquées de cactus et enfin, arriver au bord de la mer Rouge, comme au bord du monde.' 
Les objets dans ce livre sont ambivalents parce qu'ils permettant au lecteur de voir, de palper, de sentir la réalité de ce monde, mais par là même on ne peut pas oublier que toute cette réalité, matérielle et sensible, est aussi un obstacle. Que ce soit le sable, l'eau, les barbelés ou même les tissus et les bois, ce sont eux qui font l'étoffe du monde et donc qui présentent aux personnages et à leurs rêves la résistance du réel. Seul le père de Mila, souffleur de verre, peut plier, transformer, vaincre, en un instant précieux, la solidité de la matière inerte: entre ses mains et au rythme de ses expirations, le verre liquide et élastique se tord et se laisse modeler.

Les personnages sont souvent minéraux, rigides et impassibles, s'opposant silencieusement aux autres comme des objets. La mère de Mila d'abord, qui
's'était coulée dans un fauteuil orange et était restée sans bouger, retranchée derrière des lunettes noires qui lui mangeaient le visage.'
Et plus tard, et plus sinistrement, un autre personnage sur l'embarcation qui emmène les adolescents à Lampedusa, 'raidie dans la même position grotesque', dormant 'les yeux ouverts'. A côté de ces personnages solidifiés, emmurés, inflexibles, la vivacité et l'énergie des autres est d'autant plus bouleversante.

Les personnages resteront séparés les uns des autres, jamais tout à fait capables de se comprendre. Il y a de la solidarité et de la coopération, et même de l'empathie, mais les voix qu'on entend sont inéluctablement cloisonnées, isolées par leurs histoires différentes et leurs perceptions du monde qui ne pourront jamais s'accorder. Comme l'île qui est le centre de l'histoire, les personnages sont insulaires, se protègent et s'enferment. Il n'est pas question ici de grands sentiments universels, mais de ce qui pousse certaines personnes, dans certaines conditions, à se rencontrer et à s'épauler. Mais jamais ce rapport à l'autre n'est présenté comme facile, et il reste extrêmement fragile.

C'est une vraie réussite, ce Refuges - tant de calme, de précision, de beauté, de mesure et de patience dans un champ littéraire (celui de la littérature ado) très intense, hyperbolique, rapide. J'espère qu'il aura tous les honneurs qu'il mérite, et je sais qu'il est déjà encensé par la critique, mais je souhaite surtout que de nombreux adolescents découvrent et savourent cette écriture dense, tranquille et biseautée d'Annelise, qui atteint ici son apogée.

Attaque Ad Honorém

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Mon amie Alice Brière-Haquet a eu l'honneur de se retrouver chroniquée par Christophe Honoré dans sa tribune du Monde des Livres. Christophe Honoré, c'est le jeune homme aux mille talents qui est à la fois auteur, auteur jeunesse, réalisateur, et maintenant journaliste; quelqu'un qui a vraiment beaucoup de choses à prouver, donc, et le fait tout naturellement en ciblant Alice (et ce n'est pas la seule; le mois dernier, il avait étripé le premier livre d'une autre auteure).

Ce qui est bien, c'est que ce monsieur, qui a apparemment beaucoup de choses à apprendre à Alice sur la littérature jeunesse (ce n'est pas comme si Alice était auteure depuis des années et elle-même en thèse à la Sorbonne en litt-j), est aussi président du salon de Montreuil; saféplésir de savoir qu'on peut être flingué à chaque coin de couloir en décembre si on a la malchance d'avoir déplu au bonhomme.

Bref, ça m'a un peu agacée, cette chronique très raide, très basse, très lâche, très digne de gros caïd de cour de l'école qui terrorise les plus petits que lui. Donc voici ci-dessous une petite réponse en-chantée à notre héritier de Jacques Demy, avec quelques suggestions pour ses prochaines victimes.

La réponse d'Alice, plus argumentée... est ici.  







Tribune de la Charte

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Je rentre tout juste de 2 semaines de, euh, vacances (oui oui ça arrive ces choses-là, arrête de juger, toi, au fond), sans internet ou presque (joie! angoisse! terreur!), et il s'est passé, évidemment, cinq milliards de choses dont je vous entretiendrai un jour ou l'autre. En attendant, voici le lien du jour: j'ai fait scribe du mois pour la Tribune de la Charte, super initiative lancée il y a quelques mois par la Charte. Carole Trébor, je te remercie infiniment pour m'avoir proposé la plate-forme de novembre.

Ca se passe là et c'est sur la double injonction de l'auteur jeunesse, c'est-à-dire le paradoxe de se voir dire à la fois que notre travail est médiocre et sacré.

à bientôt

Clémentine

Les passions de l'âme - L'identité

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J’inaugure une petite série spéciale - après l’abécédaire il y a déjà quelques années, et les excuses il y a encore plus d’années - de billets de blog autour d’un même thème. Le terme est un peu grandiloquent, mais je vais essayer de parler avec sérieux, et surtout avec le plus de simplicité possible, de ce que je vois comme des ‘passions de l’âme’ des auteurs - ces questions vaguement philosophisantes qui nous trottent dans la tête quand on pense à ce qu’on fait. Auteurs/illustrateurs jeunesse en particulier bien sûr, mais certaines ‘passions’ seront sans doute plus généralement applicables.

Je vous donne donc rendez-vous une fois par semaine le dimanche, et aujourd’hui on commence avec la question de l’identité.


promis ça va pas être trop prise de tête

Qu’est-ce que notre identité d’auteur ou d’artiste? A première vue, une identité, c’est ce qui nous fait ‘nous’, et qui ‘ne change pas’, qui reste ‘le même’ ou ‘pareil’ (l’origine du mot). Dans notre rayon - la création - c’est donc d’abord un terme qui pourrait sembler interchangeable avec la notion de ‘plume’ ou de ‘style’; on parle souvent de ‘l’identité graphique’ d’un illustrateur. Ce serait donc le ‘grain’, la ‘voix’ - cette propriété de nos textes ou de nos images que l’on estime unique à soi, et qui fait qu’on nous reconnaît, plus ou moins aisément, rien qu’en nous lisant.

‘On nous reconnaît’ - déjà je suis passée de quelque chose d’intime et d’intérieur (‘mon’ identité, je devrais en être la maîtresse) à quelque chose que l’on regarde, que l’on fixe, peut-être, de l’extérieur. Et c’est vrai que l’identité d’un créateur est en grande partie formée par le regard, critique ou bienveillant, des autres. Le problème, bien sûr, c’est que - d’autant plus en littérature jeunesse - cette identité graphique ou textuelle va devoir s’accommoder des exigences d’un marché, de nombreux ‘gardiens’ ou médiateurs, et bien entendu des lecteurs.
identité de R L Stine façon warhol

‘Mon’ identité d’auteur n’est jamais totalement la mienne. Elle est forgée à la fois directement et indirectement: directement à travers, par exemple, des requêtes éditoriales (ralentis le rythme; on veut quelque chose de drôle; tu utilises trop d’adjectifs); indirectement à travers, par exemple, notre réaction aux succès et aux échecs (ça, ça a marché la dernière fois, je vais le refaire). L’identité n’est pas quelque chose qui jaillit librement de mon for intérieur; ce n’est pas l’expression pure de mon âme; c’est une propriété médiée et influencée par de nombreux agents. D’ailleurs, je peux (et je dois) la contrôler et la modeler: on dit souvent dans le métier ‘construire’, ‘développer’ ou ‘trouver’ son identité. 


L’identité d’un auteur, je pense, est soumise à deux mouvements contradictoires. D’un côté, il y a un conservatisme intrinsèque à la ‘construction’ d’une identité. Pour peu qu’on ait développé son identité à partir d’un ou deux livres ayant très bien marché, il peut arriver qu’on se voie défini - identifié - de manière assez rigide: c’est l’auteur drôle/ politique/ qui traite de sujets de société/ qui a un vrai sens de la formule, etc. Cela se traduit souvent par des phrases du type: ‘Untel est doué pour rendre l’atmosphère des lieux’, ‘Bidule a un style très poétique’, etc.: des phrases qui nous solidifient autant qu’elles nous complimentent. Cette identité peut très bien nous convenir… Mais rien qu’en disant ‘mon identité me convient’, j’admets déjà qu’il est possible qu’elle ne nous convienne pas - qu’on ne soit pas à l’aise dans cette identification. Plaquée de l’extérieur, et peut-être - selon nous - un peu par hasard, notre identité devient pour nous une ‘étiquette’.

example d'étiquette


Donc il y a un deuxième mouvement, qui peut être en réaction au premier, et qui est celui de l’auteur qui cherche à se reconstruire ou se réinventer une identité; ou alors, à constamment évoluer, à n’être pas reconnaissable d’une création à l’autre. On devient l’auteur ‘qui est toujours là où on ne l’attend pas’ (ce qui est, paradoxalement, aussi une sorte d’identité…). Ca peut être très bien, mais je ne pense pas que ce soit satisfaisant non plus. Parce qu’on aspire toujours secrètement à une sorte de continuité; on voudrait quand même être reconnu d’une manière ou d’une autre. Ces mouvements erratiques d’un style à un autre et d’un genre à un autre, ce désir d’échapper aux ‘étiquettes’, de ne jamais ‘se ressembler’, peuvent devenir un moyen de fuir ou de trahir son identité.

Il faut se rappeler, je pense, si on est angoissé par l’idée d’être ‘étiqueté’, que l’identité, même imposée de l’extérieur, est en réalité difficile à définir. On peut identifier facilement quelqu’un sans pouvoir dire exactement pourquoi. Je n’ai aucun mal à identifier une illustration de Quentin Blake. Pourtant, je ne pourrais pas en écrire une ‘carte d’identité’. Je parlerais de traits zigzagants, de l’aquarelle qui déborde, du mouvement, des cheveux en pagaille… Mais cette ‘identification’ n’est qu’un portrait-robot, qui pourrait aussi pointer, par exemple, vers Tony Ross. Il reste dans ‘l’identité’ d’un auteur ou d’un illustrateur quelque chose de nécessairement mystérieux, d’indéfinissable ou d’indescriptible; de l’ordre du sensible au-delà du commercial.

L’identité d’un créateur, d’autant plus en littérature jeunesse, je pense, est angoissante parce qu’elle ne nous appartient pas entièrement - elle nous appartient parfois très peu. Nous refusons d’être définis durablement par ce que quelques livres, et les aléas de l’édition, nous ont amenés à caractériser comme notre ‘identité’. Et en même temps, nous souhaitons que nos livrent reflètent quelque chose de ‘nous’ qui soit durable et unique. Nous avons peur qu’elle nous limite, et elle nous semble souvent imposée de l’extérieur; mais en même temps nous voudrions qu’on puisse nous identifier par notre ‘patte’.


une manière d'être identifié rapidement

Le problème de l’identité de la création est le même que celui de l’identité tout court: nous oscillons entre peur de ne pas nous y reconnaître nous-mêmes, et désir d’être reconnu à travers elle. Nous voudrions que nos livres nous confirment qui nous sommes ‘vraiment’, mais nous avons le plus souvent l’impression qu’ils ne nous représentent que très imparfaitement.

Il faut se résigner à considérer notre ‘identité’ de créateur non pas comme l’expression pure d’un moi profond, qui est de toute façon un mythe, mais plutôt accepter - voire célébrer - le fait qu’elle est toujours une propriété négociée entre nous-mêmes et notre audience.

Avec et sans vous

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Pour des raisons évidentes, je n'ai pas posté le deuxième billet sur les passions de l'âme le dimanche après les attentats - on avait d'autres choses à faire que de pleurer sur le sort d'auteurs/illustrateurs jeunesse ce jour-là - et puis je n'étais toujours pas super motivée pour le poster dimanche dernier. Comme cette fin d'année va être un peu particulière pour moi, entre déménagement, nouveau boulot et écriture, je reprendrai sans doute la série en janvier 2016.

En attendant, comme tout le monde, je continue à digérer l'après du 13 novembre. C'est étrange d'observer tout ça depuis ma campagne anglaise, ma tranquille ville médiévale, où la plus grande menace reste de se recevoir une gargouille sur la tête par grand vent. Encore une fois, comme pour Charlie, j'ai eu l'impression d'être avec vous, mais sans vous: je n'étais pas là au pire des moments, je n'ai rien partagé, ou si peu, avec vous. Du coup je me suis endeuillée toute seule devant mon ordinateur.

Heureusement, il y a Facebook, il ne faut pas avoir honte de le dire: pour les Français de l'étranger Facebook a été une vraie bénédiction cette année. Grâce aux réseaux sociaux on a eu quand même un peu eu l'impression d'être là-bas. Mais ça reste imparfait, immatériel. On voit et on lit mais on ne vit pas vraiment les événements. Du coup, gros désir de retourner 'au pays': avec mes collègues français ici, on s'est dit beaucoup ça, ces jours-là: on voudrait être à Paris. Et on s'est beaucoup retrouvés entre nous. Expérience commune à tous: la distraction constante, l'incapacité à se concentrer, qui n'est évidemment pas reflétée par nos collègues - les Anglais ont été absolument adorables et on a reçu des dizaines de messages, mais évidemment ça les touche moins que nous. Du coup, on a vécu très au ralenti ces dernières semaines.

Quelques nouvelles tout de même. Cette semaine, j'ai pu rentrer très brièvement à Paris - moins d'un jour - pour être présente à la remise du prix qu'a reçu Les petites reines, élu meilleur livre jeunesse de 2015 du magazine Lire. Je suis évidemment très très flattée de cette distinction, dont j'ai dit dans mon discours que je la partageais avec Tibo Bérard, mon éditeur, et Anaïs Malherbe, attachée communication/ presse, qui ont tellement fait pour que ce livre cycliste sorte du peloton... Je l'ai aussi dédiée à Bourg-en-Bresse, et je remercie ici les nombreuses personnes qui m'ont écrit depuis cette ville. J'en profite pour répondre aux 2 questions les plus fréquentes:

1) Le lycée Marie-Darrieussecq n'est ni le lycée Lalande ni le lycée Quinet. C'est un lycée imaginaire. Je ne veux pas faire de jaloux...
2) Oui, le restaurant Georges & Georgette est à l'emplacement de l'Auberge Bressane!
Comprendra qui connaît...

Je suis déjà en mesure de vous dire que je suis en train d'écrire un Exprim' suivant, mais il est un peu tôt pour trop en dire. Non, ce n'est pas une suite des Petites reines. Ca ne pourrait pas être plus différent...

Je serai re-de-retour à Paris la semaine prochaine pour le salon de Montreuil. Je dédicacerai le samedi de 10h à 12h chez Hachette, et le samedi et dimanche de 14h à 16h chez Sarbacane.

Et ensuite, ce sera le déménagement pour le grand Nord: j'ai trouvé une grande et jolie maison à York, où je commence un poste de maître de confs en janvier. Décembre très animé, donc, et où j'ai l'impression plus que jamais de ne plus faire que des passages express en France.

Sachez donc qu'on pense beaucoup à vous (à... nous), nous Français/es de l'étranger, malgré ce qui nous retient ailleurs - et la gentillesse et l'accueil de nos pays d'adoption. Que ce soit à l'intérieur ou à l'extérieur des frontières, je nous souhaite à tous un chemin vers Noël calme, pacifié, plus doux et plus affectueux que d'habitude peut-être, et confiant et responsable vis-à-vis de notre avenir commun.


Eugène et Tatiana

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Je signe aujourd'hui mon sixième contrat avec Sarbacane - déjà pas mal de livres à deux girafes sur mon étagère. Et celui-ci, venant juste après Les petites reines, est particulièrement poignant - et stressant - à signer...



Merci pour cette passionnante photo. De quel contrat s'agit-il? 

De celui de mon prochain Exprim'.

Et qu'est-ce que c'est que ce prochain Exprim'? 

Alors...

Foire aux Questions:
  • C'est une suite aux Petites reines? Non. 
  • Dis-moi au moins que c'est drôle! Par endroits.
  • C'est glauque comme Comme des images? Non.
  • C'est dur comme La pouilleuse? Non.
  • Il y a des réseaux sociaux dedans et des messages importants sur l'apparence? Euh... non. 
  • Mais je vais bien l'aimer quand même? J'espère.
C'est quoi alors? 

C'est un genre tout nouveau pour moi: une histoire d'amour, tout simplement.

Enfin, tout difficilement, évidemment. Puisque c'est une histoire d'amour.

D'amour heureux?

Il n'y a pas d'amour heureux. Ecoute Françoise.



Disons qu'alors que toutes les histoires de haine se ressemblent, chaque histoire d'amour est (mal)heureuse à sa façon. Celle-ci ne fait pas exception.

Celle-ci, c'est peut-être non pas une, mais deux histoires d'amour, avec un écart au milieu. La première, c'est celle qui s'est mal terminée il y a dix ans. La deuxième, c'est celle qui pourrait commencer quand Eugène et Tatiana se recroisent par accident.

La première fois ils avaient quatorze et dix-sept ans, la deuxième vingt-quatre et vingt-sept. Qu'est-ce qui a changé? Qu'est-ce qui reste?

Et comment ça s'appelle ce livre-là? 

Comme ça:


Cool. Et il sort quand? 

En septembre 2016.

Mais dis donc, Eugène et Tatiana ça me dit quelque chose. Tu les as volés où ces noms-là? 

A Pouchkine. Songe à la douceur est librement, mais très fortement, inspiré d'une histoire qui me hante depuis que je l'ai rencontrée il y a bien des années: Eugène Onéguine - à la fois le poème de Pouchkine et l'opéra de Tchaïkovski.

L'histoire originale est pleine de passion, de sarcasme, de poésie, de clichés, de spleen, de mort, d'amitié, de rêves et d'occasions manquées. C'est donc une histoire, sans doute la plus grande histoire jamais écrite, sur l'adolescence... 


Et de la même manière que l'original - pas pour 'faire comme', mais parce qu'il était impossible de faire autrement - Songe à la douceur est un roman intégralement en vers.

En VERS?

Libres. 

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Rendez-vous donc en septembre 2016... et avant ça, bien sûr, pour des extraits et d'autres détails. En attendant, joyeux Noël, et un de ces jours, promis, je fais un débrief de Montreuil. Mon excuse pour l'actuelle inactivité de ce blog, c'est que je suis dans les cartons et que j'ai des cours à préparer... et que jusqu'à aujourd'hui, j'avais un premier jet de roman à finir. Mais drôle de coïncidence, je l'ai fini ce matin juste avant de signer le contrat...


Пока!


2016

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Chers lecteurs, chères lectrices de ce blog, je vous souhaite une très bonne année 2016. A priori, sa grande soeur ayant eu de gros problèmes de comportement, on peut espérer qu'elle soit un peu plus douce.

Tout le monde: "Allez bye 2015! C'était chouette de te voir! bises et rentre bien hein!"
*Referme la porte*
Tout le monde: "Peut toujours courir pour qu'on la réinvite cette sale bitch."

Mais 2015 aura été une année mémorable, pour le meilleur et pour le pire. Les Anglais disent: 'to stick out like a sore thumb' - sortir du lot, se distinguer, comme un pouce douloureux. C'est un peu ça 2015: pas une année comme les autres. Un pouce tendu: vers le bas ou vers le haut, selon les semaines. Je m'en souviendrai comme d'une année d'une incomparable intensité, passant du plus profond de l'angoisse (pour la France et mes amis et ma famille à Paris), aux plus grandes surprises, joies et découvertes.

Personnellement et professionnellement, 2015 a été pour moi une année pleine de changements et de découvertes: l'année des Petites reines et de La louve, et de tout ce qui a suivi la publication de ces deux livres. L'année de mon tout premier Montreuil. L'année où j'ai lu toute la Recherche du temps perdu. L'année où j'ai obtenu mon premier poste universitaire (aujourd'hui est officiellement la date où je commence). L'année où j'ai commencé à apprendre le mandarin. L'année de mon déménagement dans une autre ville anglaise, après 9 ans à Cambridge. Quelques beaux voyages aussi.

Et une année de nouvelles amitiés fortes et d'autres encore renforcées, dont de nombreuses rencontres littéraires.

et en particulier...
...mes @mies virtuelles devenues réelles...
2016 s'annonce extrêmement studieuse, recentrée sur mon travail universitaire. J'ai des dizaines de cours à écrire (je devrais être en train d'en écrire un à l'heure qu'il est...), de nouveaux articles à faire, des collègues à rencontrer, des demandes de financement à organiser. Si ça vous semble extraordinairement ennuyeux, je comprends, mais moi ça me passionne. De coloribus et gustibus, etc.

Je vais aussi écrire, mais sans doute moins. Les visites scolaires et salons vont être radicalement coupés (déjà que je n'en faisais pas beaucoup). Question parutions, ce sera très calme; il y aura le dernier Royal Babysitters, The Very Royal Holiday (mon préféré) en avril, Songe à la douceur en septembre, et il me semble que c'est tout. Je travaillerai sur la traduction des Petites reines en anglais, qui sortira chez Pushkin Press l'année prochaine.

De mes lectures de 2015, à part, évidemment, La Recherche (sur lequel je veux écrire un billet de blog, sans avoir le courage de m'y mettre, depuis des mois), je retiendrai particulièrement, en vrac:
  • Boussole, de Mathias Enard, que je viens de lire et qui m'a laissée tremblante d'émotion car je suis une énorme geek qui adore les histoires d'amour universitaires étourdissantes de références incompréhensibles (voir aussi: Possession d'A.S. Byatt)
  • Refuges, d'Annelise Heurtier.
  • L'extraordinaire Dysfonctionnelle, d'Axl Cendres.
  • Lily de Cécile Roumiguière, gracieux et grave.
  • Je, d'un accident ou d'amour, de Loïc Demey, roman minuscule, vibrant de son absence de verbes.
  • L'hilarant et jouissif La septième fonction du langage, de Laurent Binet.
  • Des grands classiques que j'avais ratés jusqu'à cette année: La vie, mode d'emploi de Perec et Trois hommes en bateau de Jerome K. Jerome.
  • Deux BD que j'offrirai à tout le monde, toute ma vie:
découverte grâce à ma tante

découverte grâce à un collègue

Voilà. Je vous laisse car 1) je dois retourner à mes préparations de cours  et 2) vous avez mieux à faire que de lire mes voeux de bonne année. Je voudrais vous promettre plus de billets de blog cette année, et je ferai de mon mieux. 

A très vite,

Clémentine

Traductions à gogo

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Juste un petit mot rapide (et dimanche, promis, un vrai billet!) pour annoncer quelques trucs très chouette au rayon traductions:

- Le second tome des Royales Babysitters, Les Royales Demoiselles d'Horreur (titre génialissime, dû à la non moins exceptionnelle Amélie Sarn), est sorti le 13 janvier. Je dois dire que je m'étais totalement emmêlé les pinceaux et pensais qu'il sortait en avril! donc ça m'est passé au-dessus de la tête. Je ne l'ai pas encore reçu donc pas encore lu, mais il se murmure qu'il se déroule en Francie, où, mandatés par l'étrange Mademoiselle Malypense, Holly, Anna et Pépino doivent aider à organiser le mariage de la princesse Violette avec le très blafard Comte Dentu de Romanie. Je vous en dis plus dès que je l'ai!


- Les petites reines, déjà vendu en Allemagne, a été vendu en Grande-Bretagne (!!!) à Pushkin Press. C'est moi que je vais faire la traduction. Non, je n'ai aucune idée de comment je vais traduire boudin. Non, je ne sais pas quel va être le titre. Non, aucune idée de comment je vais traduire les blagues et tout. Mais tu sais rien en fait? Non pas encore tavu j'ai pas eu le temps de m'y mettre.

Et oui, l'histoire se déroulera toujours en France, évidemment (question passablement idiote qui m'a été posée plusieurs fois; désolée, chers amis qui me l'avez posée, je vous adore mais c'est quand même une question idiote).

C'est mon tout premier livre à traverser la Manche dans ce sens-là. C'est qu'elles ont des mollets, Mireille et les deux autres...
 
- Et last but not least, ma chérie Sesame, héroïne de ma toute première série anglaise Sleuth on Skates(une détective en patins à roulettes) va chausser ses rollers pour venir rencontrer des petit/es lecteurs et lectrices français/es!


Les droits des deux premiers tomes ont été vendus à Rageot. J'ai immensément hâte que vous rencontriez (enfin!) ma petite Sesame, qui a été très appréciée des mini-Angliches et pour laquelle je reçois jusqu'à ce jour des lettres d'Angleterre, des Etats-Unis et d'Allemagne...

Non, c'est pas moi qui fais la traduction!

see ya

Clem

Les passions de l'âme - La vulnérabilité à la critique

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On continue  la petite série des 'passions de l'âme' de l'auteur/ illustrateur jeunesse commencée l'année dernière. NB: cet article a été écrit bien avant la tempête suscitée par la critique de Christophe Honoré. Je n'ai pas voulu ajouter de réflexions sur le sujet dans ce billet car c'était un genre de critique très atypique.

La vulnérabilité du créateur est légendaire. On ne compte plus les images kitschissimes qui circulent sur les réseaux sociaux associant fragilité et inspiration artistique. Je me concentre ici sur la question particulière de la vulnérabilité à la critique - c’est-à-dire, littéralement, la propension à être blessé par les commentaires que d'autres personnes font sur nos écrits (d’autres articles à venir pourront traiter d’autres aspects de la vulnérabilité.)

Georges-Alain la tortue, illustrant la nécessité d'avoir une bonne carapace.
L’expérience étrange que font, je pense, beaucoup de créateurs, c’est celle de l’impact plus puissant des critiques négatives par rapport aux critiques positives. Une seule critique négative, même perdue au milieu d’un flot de critiques positives, peut suffire à ruiner une journée; alors qu’une critique positive ne provoque souvent qu’un sentiment de chaleur très agréable mais temporaire. Notre perception de l’une est souvent radicalement différente de l’autre. L’une accentue notre vulnérabilité, alors que l’autre n’a pas vraiment l’effet inverse: elle ne nous rend pas, me semble-t-il, beaucoup plus imperméable ou plus résistant.

(note: ici comme ailleurs, je tire ces outrancières généralités surtout de ma propre expérience et de discussions avec des ami/es. Je suis consciente - et intéressée par le fait - que vous puissiez avoir des expériences diamétralement opposées; la rubrique commentaires est faite pour!)

On n’oublie jamais les critiques négatives, jusqu’à leurs tournures de phrases; a contrario, il est assez rare qu’on se souvienne dans le détail de ce que racontait chaque critique positive. Du coup, une critique négative, bien mieux remémorée qu’une critique positive, est forcément plus constructive - mais dans le sens contraignant du terme: elle nous guide, consciemment et inconsciemment, dans nos écritures futures. Si quelqu’un a déclaré qu’on abuse des métaphores, on y pensera les prochaines fois, et cette pensée deviendra réflexe plus tard. Au contraire, une critique positive est peut-être plutôt vécue comme une validation; elle rassure, mais laisse moins de traces; à moins d’être très spécifique et argumentée, elle n’influencera pas autant nos écrits à venir.

Encore plus bizarrement, on a tendance à réagir à toute critique positive comme si elle exprimait seulement la sensibilité particulière d’une personne, alors qu’on réagit à toute critique négative comme si elle exprimait une vérité universelle. Si quelqu’un a adoré notre livre, on le remercie, on dit qu’on est ravi que ce soit le cas: on prend cette critique comme une heureuse opinion, peut-être lié à une inclination pour ce genre de lectures. Par contre, si quelqu’un a détesté, il nous semble évident que cette détestation représente un jugement objectif et général: il nous est très difficile de le ramener à des ‘goûts et des couleurs’.

Pourquoi avons-nous ('nous', ou peut-être juste moi, vous me dites...) souvent la vague impression que toute critique positive est subjective, et toute critique négative objective? Peut-être cette réaction vient-elle de très loin - nos parents, notre famille, les premiers à nous encenser, étaient aussi de manière évidente nos commentateurs les moins objectifs; alors que nos professeurs, surtout dans l’éducation française, ont été les premiers à nous critiquer férocement, et nous avons intégré leur jugement comme parfaitement neutre. Nous avons donc pris l’habitude de ne considérer les commentaires positifs que comme le soulagement de constater que quelqu’un qui nous aime déjà continue à nous aimer; alors que les commentaires négatifs ont toujours émané d’autorités bien moins enclines à se laisser attendrir ou influencer.

une critique objective

La critique positive est étrangement ‘glissante’: on n’y trouve pas à s’accrocher, on la frôle, sans s’y identifier complètement. On admet sa présence, on peut aussi s’en féliciter - à grand renfort de statut Facebook, etc - mais on a du mal à se l’approprier. Elle nous semble être, d’une certaine manière, quelque chose qui ne se rapporte que lointainement à la vérité. Au contraire, la critique négative est parfaitement affûtée, elle se fiche directement dans une cible intérieure dont on soupçonnait depuis longtemps l’existence: elle exprime exactement ce que l’on savait confusément, elle articule les doutes et les angoisses que nous avions sans les situer; elle lève le voile sur une vérité que l’on se sentait coupable de cacher.

Notre degré de vulnérabilité à la critique, c’est, je pense, principalement le degré de décalage entre notre réaction aux commentaires positifs et aux commentaires négatifs. Une personne qui serait constamment émerveillée, touchée, renforcée par les critiques positives, et sur laquelle les critiques négatives glisseraient comme de l’eau sur les plumes d’un canard serait la personne la moins vulnérable au monde (et probablement la plus pathologiquement narcissique). Au contraire, celui qui est incapable de trouver un soulagement dans la critique positive, et reste constamment abattu par le souvenir lointain d’une critique négative, est intensément vulnérable.

Face à ce problème, la solution pragmatique est de rester dans l’ignorance: ne pas se googler, ne pas chercher de critiques, partir du principe que les chroniques sont faites pour les lecteurs et pas pour les créateurs. Si des gens attentionnés nous les envoient, tant mieux - on peut estimer qu’il y a eu filtrage - mais on ne prend pas le risque de les dégoter nous-mêmes. C'est ce que je fais - cela fait déjà deux ou trois ans que je ne me google plus jamais.


ta tête quand tu t'es googlé

La solution plus existentielle est de travailler sur soi-même pour comprendre pourquoi on est si poreux aux commentaires négatifs et si imperméable aux commentaires positifs; d’essayer de prendre de la distance, de ne pas immédiatement admettre que toute critique négative est forcément correcte, ni toute critique positive forcément biaisée. Il faut aussi se dire, en étant auteur/illustrateur jeunesse, qu’on fait aussi notre travail principalement pour que des gens y prennent plaisir: on ne force personne à se colleter à nos créations - on est littéralement, uniquement, au service de leur bonheur.

Mais même après tout ce travail - et l’inévitable accoutumance qu’on développe à la fois à la critique positive et à la critique négative - je pense que très peu de gens arrivent vraiment à gérer la critique négative sans en être le moins du monde ébranlés. Et je suis certaine que je ne voudrais pas être de ceux-là.

Les passions de l'âme - Les livres des autres

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Encore un petit billet dans la série commencée l'année dernière et continuée la semaine dernière...
"Je ne lis pas de livres jeunesse, ça me déprime trop. Soit j'aime pas et je suis énervé qu'il y ait de la mauvaise littérature jeunesse qui discrédite la profession, soit j'aime et je suis jaloux parce que c'est pas moi qui l'ai écrit."
(Inspiré de déclarations réelles de non pas un/e, mais plusieurs auteur/es jeunesse.)

Lire les livres des autres - ah, quelle histoire, quelles joies, quels drames... J'ai des ami/es qui ne lisent jamais de littérature jeunesse pendant l'écriture d'un livre, par peur d'être influencé/e ou de perdre confiance. D'autres ne lisent jamais de contemporains. D'autres encore ne lisent que ceux qui gagnent des prix. D'autres ne lisent que ce qui est publié dans leur genre ou tranche d'âge, et d'autres... seulement ce qui est différent de leur genre et tranche d'âge.

D'autres ne lisent que les livres des copains et des copines.

D'autres encore lisent tout, tout, tout.


du coup j'en profite pour illustrer ce billet de 'livres des autres' récemment aimés...

Il n'y a vraiment aucune situation typique, me semble-t-il. Dans ceux et celles qui lisent beaucoup les livres des autres, nombreux/ses sont les cumulard/es... Il y a Anne Loyer, à la fois dévoreuse de livres jeunesse dans tous les genres pour son (maintenant ex-)blog - et elle-même auteure prolifique. Il y a Marion Brunet, qui est aussi lectrice pour Sarbacane et lit donc aussi des manuscrits non publiés. Il y a ceux et celles qui sont profs et qui lisent aussi pour conseiller à leurs élèves. Il y en a, comme Alice Brière-Haquet, (et moi) qui sont aussi universitaires et ont donc une raison supplémentaire de lire ces livres.


Personnellement, je lis en général un ou deux livres publiés en jeunesse par mois, principalement français ces temps-ci - en grande partie parce que je me suis beaucoup reconcentrée sur mon écriture française récemment, et donc j'ai un peu lâché les Anglo-saxons. Difficile de se tenir informée de tout à la fois. Je lis disproportionnellement les livres des ami/es, je l'avoue, et je lis beaucoup d'Exprim'. Mais quand je rentre en France, je fais des razzias dans les librairies, en essayant de piocher à la fois des très populaires et des petites gemmes. Certain/es auteur/es vont par défaut finir dans mon panier, depuis l'enfance ou depuis quelques années, et pour d'autres, je choisis selon le pitch.



Je le fais en partie parce que j'aime la littérature jeunesse (NAN ARRETE SERIeuX?) - et j'adore, j'adore, j'adore être emportée par un livre parfois qui rallume la lumière et me fait dire mais oui! c'est ça! c'est exactement ça qu'il nous faut! - ce matin même, par exemple, Dans le désordre, de Marion Brunet, c'est exactement ça.

Mais aussi parce que j'estime que ça fait partie de mon métier, au même titre que de relire des épreuves ou de valider des croquis.


Je trouve problématique le fait de ne jamais lire de livres jeunesse quand on est auteur/e jeunesse. Il y a plusieurs types d'excuses. Certain/es admettent, non sans honnêteté, que ça les rend jaloux. La jalousie est une question dont je traiterai une autre fois (elle mérite son propre billet), mais il est compréhensible, quoique dommage, de sombrer dans le spleen quand on trouve le livre de quelqu'un d'autre admirable, merveilleux ou enchanteur. Cependant, c'est compréhensible. Il y a des moments où l'on est plus fragile qu'à d'autres, et où le succès des un/es et des autres - même des ami/es, surtout des ami/es - ne nous rend pas aussi heureux qu'on le voudrait.

Et puis il y a ceux et celles qui disent - parfois directement, parfois indirectement - que 'ce n'est pas leur type de littérature', ou alors qu'ils 's'inspirent de tous types de littérature' (pire encore, 'j'ai pas le temps', qui ramasse les deux excuses tout en insinuant que toi, qui lis de la littérature jeunesse, tu dois être une glandeuse de première classe).


Cette raison me paraît à la fois bizarre et perverse. Au contraire de la jalousie, qui indique plutôt un sentiment d'infériorité ou d'insécurité latent, cette raison-là est plutôt pour moi le signe d'un complexe de supériorité, ou d'une identité d'auteur jeunesse mal assumée. Dans les deux cas, ça se traduit par un manque de professionnalisme et, implicitement, d'un certain manque de respect pour ses confrères et ses consoeurs.

Ainsi certains disent qu'ils ne lisent pas de littérature ado parce que 'ce n'est pas leur genre de littérature', voire (déjà entendu), parce qu'ils ne sont pas ados. La logique est tordue. On peut accepter que certaines personnes n'aiment tout simplement pas la littérature ado, bien qu'elles en écrivent - étrange, mais à la limite, pourquoi pas. Mais on dirait que la seule raison pour laquelle on devrait lire le genre de littérature qu'on écrit, c'est par passion pour ce genre de livres.

Or, il me semble évident que lorsque l'on se réclame d'une profession ou d'un art, on doit par définition montrer de la curiosité pour ce que font ses contemporains. Pas seulement pour être gentil, mais pour se situer par rapport à ce qui se fait - pour se nourrir des influences des autres, et identifier des endroits où on peut être original ou différent.

Cette 'excuse', pour moi, sonne un peu comme si quelqu'un disait 'Je suis designer de grenouillères pour enfants de zéro à quatre ans. Je ne m'intéresse pas à ce que font les autres designers de grenouillères. Après tout, je n'en porte jamais moi-même.' 

j'aime bien cette photo parce qu'on dirait que la fille sur la couv de Marion fait sursauter la gamine sur la couv de Philippe

Variation sur ce thème, les personnes qui disent qu'elles font de la littérature jeunesse par accident, ou parce que les éditeurs ont décidé que c'était le cas; mais elles, leurs influences, c'est Tolstoï et Joyce, ou alors Godard et Magritte, ou je ne sais quoi d'autre - donc, aucune raison de lire des livres des autres. Là-dedans, j'entends: 'il est hors de question que je perde mon temps à lire des bêtises alors que ce qui m'inspire, moi, ce sont les grands maîtres'.

Je veux bien, mon chou, mais pas de bol: il se trouve que, par un hasard terrible, tu es publié dans une tranche du marché littéraire qui a été de tous temps marginalisée, expulsée, censurée et sous-estimée. Tu peux rester la tête enterrée dans tes Collection Blanche, mais ce n'est pas ça qui va te rendre éligible pour le Goncourt, et ce n'est certainement pas ça qui va t'aider à améliorer ton art dans la triste niche qui t'a échu.



On a un problème en littérature jeunesse française, et ce n'est pas un problème de qualité, c'est un problème de reconnaissance. De reconnaissance vis-à-vis de la littérature 'générale'; de reconnaissance vis-à-vis de la littérature jeunesse internationale, notamment anglaise et américaine (le French-bashing se conjugue beaucoup en littérature jeunesse, c'est un vrai problème); et de reconnaissance, pour la vaste majorité des auteur/es jeunesse, vis-à-vis de quelques auteur/es à très gros succès.

Cependant, on a aussi une grosse solution en France, et je peux vous dire que ce n'est pas pareil en Anglicheland: la réaction bien gauloise de s'unir et de gronder tous ensemble; de se défendre les un/es les autres; de s'engueuler mais aussi de se respecter. La Charte des Auteurs et des Illustrateurs pour la Jeunesse n'a pas d'équivalent outre-manche. Bien sûr, il y a des associations d'auteurs, mais elles manquent singulièrement de cette solidarité qui nous anime ici, et qui me semble plus respectueuse des identités de chacun/e.

Année riche en Exprim's... il manque Quelqu'un qu'on aime de Séverine Vidal
En partie parce que notre situation est différente. D'une part, le marché anglo-saxon est dramatiquement compétitif, les sommes d'argent échangées dépassent l'entendement, et la production est ultra calibrée; c'est donc un coupe-gorge pas possible, et il dans ces conditions on est plus vulnérable et plus remplaçable. Difficile, donc, de ne pas percevoir les autres comme une menace.

oh là là mais celui-là... impubliable en Angleterre, indispensable partout. PARTOUT.

En France, on a la chance d'avoir (encore) un peu le droit à faire des livres d'orientations, de genres et de styles variés, et il me semble qu'un aspect important de l'esprit d'équipe qui anime les créateurs et créatrices de littérature jeunesse vient du fait que lorsqu'on lit les livres des autres, on se rend compte qu'on a aussi envie de les défendre, de se situer par rapport à eux, de s'en inspirer, et parfois d'y répondre - par des clins d'oeil ou à travers les rencontres. Se priver des livres des autres, c'est se priver de cette communauté-là. C'est frôler les autres auteur/es sans les comprendre, et sans se comprendre par rapport à eux et elles.

C'est donc, il me semble, un double devoir professionnel que de lire les livres des autres. C'est pour comprendre le métier, dans ses attentes et ses circonstances actuelles, mais c'est aussi comprendre que le métier est fait de personnes qui apportent leur sensibilité et leurs différences à ce champ littéraire. Même quand on n'est pas touchée par un livre jeunesse contemporain, on y apprend quelque chose. Et en particulier, à personnaliser, à rendre plus intime et plus solidaire, notre présence auprès de nos collègues.

Last, but oh my goodness, not least...

Les petites reines deux fois sur scène

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Petite update (le prochain billet arrive mais il est en cours d'écriture!) sur mes petites reines qui sont toujours confortablement juchées sur leurs vélos:

La semaine dernière, le prix Libr'anous catégorie roman ado a été remis à Tibo et Anaïs pour Les petites reines! Je n'étais malheureusement pas là étant donné que j'étais réquisitionnée dans ma ville médiévale pour verser de l'huile bouillante sur les ennemis et torturer les prisonniers avec des tenailles, la routine quoi. En attendant, regardez un peu les bobines adorables de Mr Editor de l'Année et la Reine des Relations Presse:


crédits photos Libr'anous, et merci Audrey de la permission de les reproduire!
Vous en saurez plus sur la soirée et sur tous les lauréats en cliquant ici. Le prix est décidé par 200 libraires francophones, à qui je suis évidemment béatement reconnaissante. Cela reflète aussi le soutien que les libraires ont offert à ce roman depuis sa sortie - c'est incroyable le nombre de gens qui me disent "Un/e libraire m'a convaincue de le lire". Dans les librairies, je le vois enroulé dans des petits mots écrits à la main. Je reçois des messages de libraire. C'est très étonnant et génial de savoir qu'il est si bien protégé et distribué par des gens que je ne connais pas personnellement, mais qui ont envie de voir Mireille et ses copines entre les mains de jeunes lecteurs et lectrices. Dingue.

Une autre nouvelle encore: nous avons appris hier que la metteuse en scène Justine Heynemann et sa troupe de théâtre, qui depuis la fin de l'année dernière travaillaient sur une adaptation théâtrale des Petites reines, ont gagné un gros concours organisé par un réseau de théâtres en région Ile-de-France, et vont donc avoir le financement et les théâtres pour organiser une tournée de la pièce l'année prochaine! Il y avait soixante troupes et projets, et Justine et son équipe ont gagné à l'unanimité. C'est mérité... Je ne vais pas dévoiler ce que je sais de la mise en scène, mais ça a l'air génialissime.

A 2017 donc pour voir nos trois boudins et le Soleil en scène...

... et à très vite pour un nouveau billet! 



Mon nez, mon chat, Louise Rennison et moi

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Je viens d'apprendre la mort de Louise Rennison, la génialissime auteure de la série du Journal Intime de Georgia Nicholson. Louise Rennison venait à peine d'entrer dans la soixantaine... grande tristesse et grand merci à celle qui réussissait à nous faire hurler de rire alors qu'on était des jeunes filles grosses, moches et timides au début des années 2000.


Tellement d'heures passées à zygomatiser sans fin avec Georgia dont les jambes à moitié poilues lui faisaient spéculer que les hommes préhistoriques effrayaient les dinosaures avec seulement l'avant du mollet; avec sa petite soeur adorable et terrible, sa mère pourvue d'une étagère en guise de poitrine, ses copines toutes plus loseuses les unes que les autres, et bien sûr Super-Canon qui reste même Super-Canon même quand Georgia, installée la tête sur ses genoux, a une vue directe sur l'intérieur de ses trous de nez. Souvenirs en vrac: Dave la Marrade et ses blagues à deux balles (mais siiiiii, Georgia, c'est l'homme de ta vie, comment ne le vois-tu pas??), le Stalag 14 (alias le collège) et ses moustachues professeures, et évidemment Angus, chat furieux et psychotique. Et ce nez!!! (qu'elle tentait de faire rapetisser à l'aide d'un soutien-gorge bidouillé, me semble-t-il.)

Je ne sais pas combien de fois j'ai relu ces livres fluo dans ma chambre, secouée de fous rires. Il y a à peine trois jours, je les recommandais encore à une jeune lectrice de 12 ans qui m'avait envoyé un email. En fait, à chaque fois que je reçois un email me disant 'J'ai aimé les Petites reines - maintenant je lis quoi?', ma réponse est toujours la même: la série des Georgia Nicholson. Et d'autres aussi: évidemment du Marie-Aude Murail, Oh, Boy!, les Nils Hazard et les Babysitter Blues; Verte et J'envie ceux qui sont dans ton coeur de Marie Desplechin, les Alibi de Susie Morgenstern, Je manque d'assurance d'Agnès Desarthe. Oui, old school, mais c'était ça pour moi l'adolescence, avec Robert Cormier en plus et évidemment Pullman et Potter. Mes rires venaient de là, et Mireille est évidemment redevable à Georgia.

Au nom du Top Gang et de toutes les déformées, boulottes, mal fringuées, timides et acnéiques anonymes, merci, Louise Rennison, et salut Klingon. Il paraît que tu étais malade. J'espère que ton docteur était aussi sexy que celui de Mutti.

Les passions de l'âme - Ecrire comme une abeille

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Dans quelques semaines, je serai à nouveau en weekend intensif de formation continue, à enseigner à des adultes l'écriture créative pour la jeunesse. J'en ai parlé récemment à Tom Lévêque, qui en a fait un billet incroyablement bien goupillé sur son (incontournable) blog: il y a une interview en anglais, allez écouter si ça vous intéresse de savoir si je connais bien mes verbes irréguliers - sinon, Tom l'a transcrite ET traduite (what a man). J'avais aussi écrit sur le sujet l'année dernière.

Pour les très paresseux/ses qui n'auraient pas la motivation d'aller (re)lire ou écouter mes sages paroles, je vous fais un débrief rapide sur ce que je pense de l'apprentissage de l'écriture:
  • Oui, c'est possible d'apprendre à écrire. 
  • Cependant, je ne suis pas certaine qu'il soit possible 'd'enseigner' directement l'écriture. 
  • Je pense qu'on peut enseigner à écrire, mais indirectement, en enseignant surtout la lecture. Apprendre à lire, à lire vraiment, en comprenant les mécanismes et les stratégies de ce qu'on lit, est une grande étape dans l'apprentissage de l'écriture. Et ça, heureusement, c'est beaucoup plus facile à enseigner: forcer des gens à faire de l'analyse de texte, c'est mon boulot de toute façon...
Je ne vais pas reparler des cours d'écriture créative, mais plutôt de ce 'message': c'est en lisant qu'on apprend à écrire. Message banal, articulé par presque tout/e auteur/e qui se respecte, certains plus joliment que d'autres: Philip Pullman dit:'Lire comme un papillon, écrire comme une abeille...'Dans l'idéal, l'auteur/e ne lit pas, mais butine; et puis transforme et recompose.

l'abeille coule

Mais où est la limite entre butinage et imitation, entre influence et suivisme? Et comment équilibrer désir d'originalité et désir de rendre hommage?

La première question est particulièrement difficile en jeunesse - et, je pense, dans d'autres types de littérature à fort potentiel commercial - où l'on nous enjoint toujours à "aller voir", "jeter un oeil", "se demander si on ne pourrait pas faire un peu comme" ce qui marche en ce moment. Et la tentation est forte d'emprunter un peu, beaucoup, de ce qui se fait déjà.

Ce que je trouve très intéressant, c'est qu'il est très rarement question de plagiat, alors même qu'on a parfois des exemples absolument hallucinants de copies pratiquement conformes. La série du Journal d'un dégonflé a donné lieu à une prolifération aberrante de clones, et pourtant on en parle comme d'une 'formule' qui marche. C'est le signe qu'on est là dans une logique de déclinaison d'un produit plutôt que dans une pratique de 'butinage'...



Mais à part cet exemple un peu extrême, en littérature jeunesse, où l'on crie beaucoup à la 'future tendance' où au 'genre qui enflamme les ados', on peut vite, si on ne fait pas attention, se retrouver à lire en établissant, consciemment ou inconsciemment, des recettes - et à écrire en cochant les cases qu'on s'est construites.

Sauf que la plupart du temps, le butinage est moins forcé, et le résultat beaucoup plus délicieux. De petits pollens collés à nos pattes viennent se poser sur nos pages sans qu'on ne l'ait décidé. On lit un livre qu'on trouve mou et médiocre, et pourtant, sans s'en rendre compte, on en accroche des petites fibres au passage. Au milieu d'un chapitre, on s'aperçoit qu'on a attrapé les tics de quelqu'un autre. On se relit, et on comprend qu'on est devenu la poupée d'un malicieux ventriloque.

quand j'étais petite j'avais écrit plusieurs volumes des aventures de 'Sam-Sam et Nénette'.
Aucune idée d'où ça m'était venu.

Et quand on le fait exprès - quand on fait référence - quand on commence à mettre sur l'étiquette de nos petits pots de miel le nom des champs dans lesquels on a trouvé les fleurs... alors les ennuis commencent.

Ces influences-là - celles qui deviennent des allusions, des références intertextuelles, des citations - sont puissantes. On risque de les convoquer comme on invite une archiduchesse à prendre le thé chez soi: seulement après avoir changé tout le décor, rangé le chat sous le tapis, acheté des biscuits qu'on déteste et trouvé des sujets de conversations aussi artificiels qu'ennuyeux.

Oui, ta référence, elle ressemble à ça

 On risque aussi de passer pour un/e snob de première, et de tomber dans cet abîme à mitraillage de bâillements de la postmodernité littéraire: un livre qui se lit comme une bibliographie annotée, avec des clins d'oeil tellement appuyés que ça te fait mal aux paupières rien que de regarder la page.

La première chose que m'a dit Tibo quand je lui ai annoncé que je travaillais sur une réécriture d'Eugène Onéguine, c'était "Kill your darlings"(bon d'accord, en fait c'était "EUHH QUOI??????????? CA VA PAS LA TETE????). En gros, ne sois pas complaisante ni déférente: c'est ton livre, ton histoire, ne va pas nous mettre des références à tout bout de champ.

Donc comme je suis quelqu'un de très obéissant, j'ai presque obéi relativement sagement et j'ai surveillé mon clignement d'yeux - mais évidemment, on ne peut pas aller trop loin dans la réserve non plus... Car quand on est hantée par une histoire, par des auteurs ou par un style, ce serait ne pas être 'soi-même' que de leur refuser l'entrée chez nous. 

Ne pas priver nos écritures de nos lectures, donc. Mais aussi se fabriquer un plancher solide, et refuser de changer la moquette, les rideaux ou la peinture parce que l'un des invités objecte qu'ils ne sont pas à son goût. On a beau l'adorer et l'admirer, le darling en question doit se souvenir que c'est chez nous, ici.

Ecrire comme une abeille, donc: pas seulement faire du miel, mais aussi construire des murs de cire pour qu'il ne dégouline pas partout. C'est ta ruche, après tout.



Incorruptiblement vôtre! Avis aux écoles...

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Eplapourdissement de la semaine: j'ai deux livres nominés au Prix des Incorruptibles de cette année! Les petites reines et Lettres de mon hélicoptêtre sont tous les deux en lice dans leurs catégories respectives.


Je suis ravie en particulier pour ma petite héroïne en hélico, dont le tour du monde, illustré avec moult pastel et pétillements par Anne Rouquette, avait été assez discret jusqu'à présent. C'est un bouquin avec lequel on peut faire de très chouettes activités en classe - par exemple, des hélicoptêtres chargés de tas de souvenirs du monde au tableau...


Je suis aussi, évidemment, super-heureuse pour Les petites reines, dont j'ai aussi appris cette semaine qu'il était sélectionné pour le très prestigieux Prix Sorcières (!!!) aux côtés de Marie Chartres, Caroline Solé, Hubert Ben Kemoun et Mathieu Robin.

Pour ceuzécelles qui ne le sauraient pas, le Prix des Incorruptibles est un prix tout à fait hors norme: la sélection est annoncée un an avant la remise du prix, et des exemplaires spéciaux (dits 'exemplaires Incos') des titres en lice sont imprimés pour les écoles. Ce sont ensuite des milliers d'élèves qui votent pour leur préféré dans chaque catégorie.

Cette année, c'est mon album La louve, illustré par Antoine Déprez, qui était nominé, et j'ai vu en quelques semaines l'incroyable impact du prix: des messages de parents et d'enseignants de toute la France ont commencé à pleuvoir dans ma boîte mail... c'est un moyen extraordinaire de faire voyager un livre.

même pas peur!
(enfin, j'ai quand même eu quelques retours indiquant que c'était un peu flippant comme histoire)
Le Prix des Incos est célèbre pour son organisation de très nombreuses rencontres scolaires... et c'est là que les larmes commencent à ruisseler sur mes petites joues car, pour cause de problèmes de réglage dans ma machine de téléportation (et de job à temps plein), faire des rencontres en France est très très difficile pour moi. C'est un vrai regret, car j'adore ça. Choisir c'est renoncer, etc., mais le renoncement à une vie de rencontres scolaires sur les routes de France est un effet particulièrement douloureux de mon choix d'une vie universitaire. 

Or, depuis quelques mois, j'ai commencé à faire des rencontres par Skype, et ça se passe hyper chouettement. Propulsée depuis mon salon dans des écoles à travers la France, les élèves m'ont montré des bandes-annonces, des cartes, m'ont joué des saynètes et lu des extraits qu'ils avaient préparés, et j'ai répondu aux questions, lu des passages aussi, et je leur ai montré des images par écrans interposés.

J'ai été impressionnée de la qualité des interventions qu'on peut faire de cette manière. Il me semblerait même que les ados les plus timides le sont un peu moins quand on est sur grand écran...

Donc, ceci est un appel aux écoles incorruptibles - et aux autres - s'il vous plaît, invitez-moi sur vos écrans! ça sera fun, même si j'ai un visage tout plat d'1m50 de haut. Je répondrai aux questions avec le même entrain qu'en vrai. On aura un vrai échange... et je serai vraiment là.

Parce que c'est peut-être virtuel... mais c'estune vraie rencontre!

Si vous m'écrivez, ou à Anaïs Malherbe de Sarbacane, on vous enverra plein d'infos et de précisions sur les conditions. Il y a aussi (comme toujours) une page très bien faite sur le site de la Charte.

Merci encore aux Incos et aux Sorcières!

Un presqu'anniversaire ensorcelant!

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Demain, ce sera l'anniversaire des Petites reines et de Carambol'anges... je me rappelle comme ils étaient mignons, tout frais sortis de l'imprimerie! ils ne faisaient pas leurs nuits à l'époque, on cododotait, je leur chantais des berceuses, etc... et maintenant ils marchent tout seuls! ils grandissent trop vite...

il y a 1 an!
Les petites reines a bien vécu sa vie (et changé la mienne...); Mireille, Hakima et Astrid se sont fait des ami/es partout en France, auprès des jeunes, des libraires, des profs et des parents... le roman a gagné le Prix Libr'à Nous catégorie ado, le prix du meilleur livre jeunesse de l'année du magazine Lire, le prix Millepages, le prix NRP; il a représenté la France dans la liste d'honneur IBBY internationale, il a été nominé aux Incos et à d'autres prix, il a été vendu au cinéma et au théâtre - et aujourd'hui, il a gagné le Prix Sorcières!

Merci, merci, merci aux sorcières (bien aimées, bien entendu) de l'association pour cette distinction vraiment émouvante. Honnêtement, même si bien sûr j'avais capté que j'étais nominée, je n'avais pas pris la mesure du truc jusqu'au moment de l'annonce... où je me suis soudain rendue compte à quel point cette récompense avait une énorme valeur symbolique pour moi, étant donné les livres et les auteurs qui l'ont remportée depuis ma plus tendre enfance: JK Rowling, Marie-Aude Murail, Claude Ponti, Anne Fine, Susie Morgenstern, Timothée de Fombelle, Brigitte Smadja, Malika Ferdjoukh, Louis Sachar, et j'en passe. Je suis incrédule! (et encore un peu assommée) de trouver mes trois cyclistes dans cette liste.

Coïncidence ou non, j'ai justement terminé en début de semaine La pyramide des besoins humains, de Caroline Solé, qui était aussi nominé (et sur de nombreuses autres listes de prix!), qui a accaparé mon attention assez obsessionnellement pendant un voyage en train. Il parle lui aussi, puissamment, de jeunes gens pris dans une culture de l'image et dans la menace/ tentation de la 'viralité' sur Internet. Christopher pourrait être un cousin de Mireille... je n'ai pas encore lu les autres nominé/es, mais je suis ravie d'avoir fait partie de cette liste entièrement francophone et de haute qualité:








Les Prix Sorcières cette année ont été attribués en grande majorité à des éditeurs indépendants, ce qui est une vraie joie pour moi et pour tous ceux qui croient en la force de ces petites équipes soudées, vives et prêtes à prendre des risques. C'est l'occasion de (re)dire merci àSarbacane à qui je dois tant.

Avant que Nel ne se plaigne que je l'oublie dans ce billet d'anniversaire, je suis aussi très heureuse d'annoncer que Carambol'ange, illustré par Eglantine Ceulemans, a hier le prix Ruralivres en Pas-de-Calais(ça tombe bien, c'est là où j'ai passé la moitié de mes vacances toute mon enfance...). J'étais allée il y a deux ans à Ruralivres en Cambrésis, dont je garde un souvenir très tendre - plein d'enfants qui galopent et rigolent, un gîte magnifique dans les champs, des bêtises (de Cambrai) dans un grand tube en métal. Vive aussi, donc, les autres prix et l'attention qu'ils portent aux parutions un peu éclipsées par d'autres! Car on ne peut pas dire que Carambol'ange ait reçu le quart du tiers de l'attention de sa grande soeur...

Merci encore à toutes les librairies et bibliothèques qui soutiennent les livres et les conseillent aux ados! 

Accio champagne!

circa 2005
 

Réalités?

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J'ai une passion plus ou moins secrète, enfin disons discrète, pour les peintres réalistes contemporains. Discrète en partie par manque d'expertise - je ne sais même pas si 'réaliste' est le bon terme, je n'y connais rien en histoire de l'art et aux terminologies d'usage, mais bon, comme dit l'autre, je sais ce que j'aime. Ce que j'aime, c'est ces peintures figuratives de l'ordinaire, d'une inquiétante étrangeté par excès de réalisme, mais surtout pas hyperréalistes - je perds tout intérêt dès que ça manque de failles, j'aime les perspectives juste un peu fausses, les excès de couleur, les anamorphoses bizarrement perceptibles, mais dont les raisons géométriques exactes restent indétectables.

Je collectionne donc tranquillement un petit musée virtuel au gré de mes trouvailles.Thomas Lévy-Lasneest l'un de mes peintres préférés, avec ses extraordinaires huis clos où des couples vaguement indifférents consultent leurs téléphones portables, affalés sur des meubles Ikea facilement reconnaissables, entre un Gallimard éventré et une bouteille de Coca Light. J'adore aussi Adrien Belgrand, ses hypnotiques scènes de piscine, ses liseuses concentrées, son odalisque maigrelette avec trace de bronzage, idéal féminin du 21e siècle...

Et là je reviens de Madrid ou j'ai pu attraper au musée Thyssen une exposition extraordinaire sur les peintres réalistes espagnols du 20e siècle. J'ai découvert les oeuvres d'Isabel Quintanilla et d'Antonio López, de María Moreno et Amalia Avia (entre autres). De ces peintures, je n'ai pas tout aimé, mais quand 'ça parle', qu'est-ce que ça raconte...


Isabel Quintanilla, "La pièce à couture" (1976)
Antonio Lopez, "Lavabo et miroir" (1967)

Dans un tout autre genre, j'ai aussi adoré découvrir à Madrid Joaquín Sorolla,dont il faut absolument aller voir le musée quand on en a fini avec le Prado, le Reina Sofia et le Thyssen (bon, c'est-à-dire jamais, mais il faut quand même y aller). Sorolla, tout comme Caillebotte (mon seul chéri parmi les 'impressionnistes', sans doute parce que ce n'est pas vraiment un impressionniste), a ces rendus de lumière mariés à une précision du trait qui le fait basculer pour moi du côté clair de la force.

"Le bain du cheval" (1909)

"Après le bain", 1919

Là encore, tout ne m'a pas plu, mais la brillance de certains de ses tableaux (la brillance au sens propre du terme) est bouleversante - dans l'atelier gigantesque, déjà arrosé de soleil, où de nombreuses peintures 'de plage' sont exposées, on a l'impression d'une lumière quadruplée.

Le musée lui-même est un bonheur à visiter, une goutte de verdure en plein milieu d'un quartier de Madrid où rugissent de larges avenues à angle droit. C'est l'ancienne maison de Sorolla, et son jardin est plein de toutes petites fontaines, entre ses buissons taillés au coupe-ongles, des fleurs grimpantes et des arbustes.




Des sousous dans la sousoupe

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Tes résolutions de l'année pour soutenir les libraires:

  • Ne plus commander sur Amaz$n: 
  • Acheter plein de livres dans ta librairie de quartier: 
  • Commander les livres dans ta librairie de quartier que ta librairie de quartier n'a pas parce qu'elle n'est pas extensible comme le sac de Mary Poppins, au lieu de repartir en ronchonnant que puisque le livre que tu cherches n'y est pas tu vas l'acheter sur Amaz$n: 
  • Si tu n'habites pas en France, apporter une GROSSE valise pour pouvoir rapatrier dans ta terre d'exil toutes les nouvelles nouveautés achetées en librairie: 
  • Aller explorer les librairies d'autres quartiers 
  • Apporter des petits chocolats aux libraires ✔ 
  • Poster sur les réseaux sociaux des photos de piles de livres que tu viens d'acheter dans une librairie, avec le nom de la librairie en question 
  • Demander des conseils de lecture aux libraires, et les suivre 
T'as fait tout ceci-dessus? Well done, you're a darling. Plus qu'une seule petite chose, alors:

S'ilteplay, soutiens la libraire La Soupe de l'Espace. Tu en as forcément entendu parler: cette librairie jeunesse du Var, hyperpopulaire, a créé il y a quelque temps sur Ulule une collecte de fonds pour avoir un peu moins de pression question finance - ces derniers temps, sa soupe ne mijotait plus tranquillement, c'était un peu cocotte-minute question budget, si tu vois ce que je veux dire:

Le but de ce financement participatif est très clairement de nous aider à sortir la tête de l'eau, de sauver la librairie... 8 ans après notre ouverture, et malgré un Chiffre d'Affaires en constante évolution (et des bilans comptables positifs !), nous sommes face à une situation économique très difficile (ne le cachons pas, avec un très gros découvert).
La super nouvelle, c'est que la Soupe a récolté 46 581 £ 
au jour d'aujourd'hui (expression idiote).  

Mais pour pouvoir vraiment respirer, il faudrait encore un peu plus. 

Ajoute ton grain de sel et ton tour de moulin a poivre en cliquant ici. Mets-y le prix d'une soupe Franprix, si tu peux la couper de ton marché de cette semaine. Mais si tu as des comptes dans les banques panaméennes, par contre, sens-toi libre de donner un peu plus. 

C'est une belle cause, pas louche (ha.ha.), et c'est un moyen puissant de dire OUI aux livres, aux libraires, aux créateurs et au beau soleil du Var.

Flash!

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Je viens de finir de préparer une présentation que je donne demain pour des collégiens qui vont écrire de la flash fiction - des nouvelles ultra courtes, entre quelques mots et 100, 500 ou 1000 mots (non, c'est de la triche, trop long). Il existe des flash fictions touchantes, marrantes ou flippantes, de juste quelques lignes... comme celle-ci, par Dave Donovan:

The situation at the elementary school is dangerous. Childhood has taken Adolescence hostage, and they may not give in this time. The police have already recovered one body:  a science teacher, his mouth stuffed with proven truths, duct taped shut. The hoodlums will give up their guns and cell phones for picture books and dress-up clothes. They want to talk to Santa and the Tooth Fairy. They want bedtime stories and lollipops. They are tired of knowing everything, being everything. “We want miracles,” they say. “We want to go back.” They say they want to believe in the smallest heaven.


(Traduction) La situation dans l'école primaire s'envenime. L'Enfance a pris l'Adolescence en otage, et menace de ne pas se rendre, cette fois. La police a récupéré un corps: celui d'un professeur de SVT, la bouche bourrée de vérités objectives, bâillonnée au ruban adhésif. Les voyous affirment qu'ils rendront leurs armes et leurs téléphones portables en échange d'albums illustrés et de déguisements. Ils veulent parler au Père Noël et à la Petite Souris. Ils exigent des histoires et des sucettes. Ils en ont assez de tout savoir et devoir tout être. "On veut des miracles," disent-ils. "On veut y retourner." Ils disent vouloir croire en un minuscule paradis. 

Pas mal, non? (Traduction non professionnelle aside). Il existe aussi des 'six-word memoirs', des autobiographies en six mots, exercice difficile et parfois émouvant dont les résultats me plaisent assez (cliquez pour le lien):

Regret. Should have been a writer.Steve_Anthony

It's likely I'll repeat these mistakes.SiltySweet

I am not so easily summarised.Kayl Cecchini


(Traduction: Regret. J'aurais dû être écrivain.
Je referai probablement ces erreurs.
On ne me résume pas si aisément.)

Allez, petit challenge du jour, juste parce que!

En commentaire, écrivez-moi:

  • soit une autobiographie en six mots
  • soit une flash-fiction en dix mots ou moins...
On gagne quoi? Rien, t'es vénal toi c'est fou. Allez vas-y! Bon, je commence, vu que c'est moi qui ai proposé:

Autobiographie en 6 mots: (t'as le droit a plusieurs essais t'as vu)
  • Tiens, une île, si j'y allais?
  • Jamais assez de crottin de Chavignol. 
  • Non, toujours pas de vraie littérature.
  • Cherche la réponse dans Harry Potter.
Et flash-fiction en dix mots ou moins...
  • T'ayant appelé, j'entends ta poche. Clefs et monnaie bavardent.
  • Mon ex pécho des meufs avec ma recette de brownie. 
  • Lorsque son pistil la démangeait, elle faisait appeler un colibri.
  • Trop couvé, l'enfant googla: 'comment se perdre dans la forêt'
  • Déguisé en bogue de châtaigne, l'oursin espionnait les hérissons.
A vous!
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